A l’occasion du 25 janvier
Abdelrahim Ali écrit:
11 ans depuis janvier : que s’est-il passé ? (2-3)
Les vérités anciennes continuent de susciter l’étonnement
Les rapports des renseignements américains ont décrit Al Sissi comme semblable à Abdel Nasser, mais réaliste dans une large mesure
Les Etats-Unis ont créé al Qaëda et ont commencé une guerre en Afghanistan pour préparer leur arrivée dans la région et à partir de la théorie du triangle
Le régime de Moubarak a négligé les rapports de sécurité relatifs aux mouvements américains
Les secrets de la relation des Américains avec le groupe terroriste : du secret à sa découverte après les événements de l’invasion de l’Irak en 2003
La guerre des sociétés et la partition des pays était la nouvelle théorie des Etats-Unis dans les guerres
La secrétaire d’Etat américaine CondoleezzaRice a lancé en 2004 la théorie maudite du « chaos créateur ».
Mohammad Morsy al Ayyat a tenté de rencontrer l’ambassadeur américain après les événements du 11 septembre 2001 pour l’informer du refus du groupe des opérations terroristes.
On s’est opposé fermement à l’exploitation de la colère des Egyptiens sur les places en opération de sabotage.
On a supporté les accusations et les poursuites judiciaires et l’intimidation arrivant à des tentatives d’assassinat « moral et matériel ».
Les groupes du mal ont tenté de contrôler la conscience collective des Egyptiens et les événements du 25 janvier n’étaient pas isolés de ce qui se passait dans le monde.
La révolution du 30 juin a montré les différends entre le Congrès américain et les appareils de sécurité et la Maison Blanche sur la façon de traiter avec Le Caire.
Le groupe des Frères n’a participé à aucune escalade contre l’occupation américaine de l’Irak et les instructions de son guide ont contribué à confirmer son soutien.
11 ans sont passés depuis les événements du 25 janvier et ces événements continuent d’être les plus flous dans l’histoire de l’Egypte, et lorsqu’on essaie de lire cette grande quantité d’articles et de livres et de recherches publiés par diverses parties, on ne comprend pas ce qui s’est passé, mais moi, en tant que chercheur je peux vous dire avec la conscience tranquille que les Egyptiens ont été victimes de la plus grande duperie de leur histoire, s’agissant de la réalité de ce qui s’est passé ces jours.
Avant d’entrer dans l’analyse de cet événement je voudrais éclaircir mon point de vue sur l’évaluation scientifique de ce qui s’est produit de cette façon
Je ne pense pas que les événements de janvier 2011 aient été une révolution au sens scientifique et réel de la révolution, et ce n’était pas un complot au sens scientifique et réel du complot.
C’était une révolte populaire pour laquelle toutes les circonstances objectives en termes de corruption et d’injustice étaient réunies, mais elle n’est jamais arrivée au niveau de la révolution.
Car pour que la révolution arrive, il faut deux facteurs :
une circonstance objective : l’existence d’un état d’insatisfaction populaire des politiques du régime arrivant à une impasse et cela existait en janvier 2011
Et une circonstance interne : l’existence de forces politiques et sociales capables de diriger un mouvement populaire vers la réalisation des intérêts supérieurs de la nation et des masses et cela n’existait pas au moment des événements de janvier.
Et toute atteinte à cette équation changera le concept de révolution complètement.
si la circonstance objective change, nous l’appelons adolescence politique de forces politiques non conscientes ou saut dans le vide ou ???
Et si la circonstance interne change, comme dans les événements de janvier, on appelle ça révolte qui n’arrive pas au niveau de la révolution, et c’est cela qui a conduit à la récupération de la révolte de janvier par les Frères et leurs alliés.
J’ai suivi les événements de près, et j’ai su depuis le premier instant que le régime n’allait pas tenir face à la colère des Egyptiens, parallèlement à un plan de certaines parties de semer le désordre dans cette région perturbée du monde, pour rectifier les erreurs du plan de partition Sikes Picot de la fin de la Seconde guerre mondiale.
Mais cette fois-ci, sur le terrain de la paix et des intérêts communs, un plan minutieux fait pendant longtemps avant janvier 2011.
Et durant les dernières années nous avons mené un combat dur sur deux niveaux :
le premier : politique, qui part du refus total de la trahison de la patrie, ou de sa vente aux enchères internationales.
Dans ce cadre, nous nous sommes tenus contre ceux qui ont voulu transformer la vague de colère des Egyptiens sur les places en activité de sabotage visant à disloquer ses institutions nationales pour transformer le pays en région molle que l’on pourra composer facilement selon la volonté des planificateurs.
On n’a pas renoncé à utiliser tous les moyens possibles pour défendre la patrie.
Nous avons beaucoup enduré, accusations et procès, intimidations, allant jusqu’à la tentative d’assassinat, moral et matériel, mais nous n’avons pas reculé, et avons même persisté et en sommes arrivés à un affrontement sur la scène internationale dans les capitales d’Europe, Paris Londres, Munich Bruxelles et Strasbourg.
Second niveau : des études scientifiques du phénomène… Phénomène du printemps arabe et exploitation des forces intérieures et extérieures hostiles au contexte du développement naturel de nos sociétés, Nous savions qu’une partie de ce combat tournait sur la terre, mais la plus grande partie pariait sur le kidnapping de la conscience collective des Egyptiens, et nous avons continué notre travail de recherche avec objectivité sans partir d’idées préconçues, nous avons essayé de savoir ce qui s’était passé durant les 18 jours des événements, mais il fallait aussi chercher ce qui s’était passé avant et après ces événements en Egypte et en dehors
Car les événements du 25 janvier n’étaient pas isolés de ce qui se passait dans le monde à propos de l’Egypte.
Je sais que notre résultat ne plaira pas à beaucoup, et sera une surprise pour d’autres, mais c’est notre résultat.
J’ai abordé dans le chapitre précédent les plans de l’agenda occidental dans la région, et qui n’est pas isolé des événements du 25 janvier, et de tout ce qui s’est passé dans d’autres pays arabes, et cela en dessinant les cartes de la région, et en la divisant, et soutenant le Printemps arabe.
On a présenté nombre de plans qui ont commencé après la victoire d’octobre 73 et la tentative de briser les armées arabes, et en particulier égyptienne, et le projet Bernard Lewis de briser l’unité constitutionnelle des pays arabes, et de démanteler les pays d’Afrique du nord, la péninsule arabe la Syrie, le Liban et la Jordanie, et détruire les facteurs de tout projet de création d’un Etat palestinien.
On a révélé la coopération américaine avec les Frères et la reconnaissance d’un papier de recherche américain de coopération du président Obama avec le groupe, jusqu’à la révolution du 30 juin qui a mis fin à ce plan.
Les Américains et la reconnaissance de la force de Sissi
Mais après le 30 juin, la situation a changé et une divergence est apparue entre le Congrès américain et les appareils de sécurité et la Maison Blanche sur la façon de traiter avec le Caire.
La question essentielle était : vont-ils continuer le plan préparé de division de l’Egypte commencé depuis octobre 73 et réactualisé depuis 2004 par le biais de la théorie du chaos créateur, et la guerre des sociétés, ou accepter le fait accompli, et s’entendre avec Sissi en tant que chef d’Etat capable de diriger la région ?
Les rapports des renseignements américains ont décrit Sissi comme ressemblant à Abdel Nasser mais en fait dans une large mesure réaliste, et ayant étudié en Amérique, indiquant qu’on peut le soutenir, pour que la région n’échappe pas à tout contrôle et qu’il n’arrive pas une nouvelle guerre.
Il y a eu une hésitation dans la position américaine, mais le lobby sioniste a tranché la question lorsqu’il a organisé une rencontre entre Obama et dix directeurs des grandes banques américaines, ceux-ci apportant un message du président israélien Benyamin Netanyahu incitant l’homme à reprendre l’ancien plan, lui rappelant l’importance de ne pas gaspiller l’effort de plus de 41 ans.
Le plan de division de la région ressemblait à celui de Sykes Picot, mais à la différence de celui-ci, qui fut témoin de différends importants, les relations entre les Américains et les pays européens étaient harmonieuses et fortes. C’est pourquoi le moment était propice pour redessiner la région.
Le nouveau Sykes Picot commença en 1973, après la défaite d’Israël, et les Etats-Unis ont commencé à étudier cette guerre, et à se demander pourquoi les Egyptiens avaient gagné, et ce qu’il se passerait si la guerre avait continué de cette façon.
Et là apparut la théorie du triangle qui voulait que si un événement fâchait le peuple américain, il fallait chercher un ennemi qui poussait le peuple à faire pression sur le gouvernement, qui lui-même mobilisait les forces, qui réalisaient des victoires, et le peuple les saluait, et le gouvernement continuait son soutien, pour que la relation entre le gouvernement, le peuple et les forces combattantes reste constante.
Cette relation exigeait l’existence d’un ennemi, et cet ennemi tout prêt était al Qaïda.
L’organisation al Qaïda
Des appareils en Amérique ont œuvré à attirer le danger sur ses terres, et ont fait entrer les exécutants des événements du 11 septembre, et après les attaques dont les mystères n’ont pas tous été éclaircis encore, les Etats-Unis ont annoncé qu’ils avaient trouvé l’ennemi, et ont commencé une guerre en Afghanistan, en préparation de l’entrée dans la région, et de fait, peu de temps après, ils entraient en Irak, dont ils ont fait tomber le régime. Et ils avaient préparé à cela par leurs bases au Qatar, au Koweit, et dans l’Atlantique.
Les Américains ont beaucoup perdu dans la guerre, et c’est pourquoi en 2004, une nouvelle théorie sur les guerres est apparue, celle du chaos créateur, lancée par la secrétaire d’Etat américaine Condoleezza Rice.
Elle postulait la nécessité de démanteler les pays par le biais de la guerre des sociétés, en liquidant la société de l’intérieur sans besoin d’intervention extérieure.
En 2004, le régime de Moubarak comprenait bien ce qui se passait, il recevait des rapports de sécurité sur les mouvements américains, mais il ne s’est pas mobilisé, peut-être parce qu’il pensait qu’il était impossible de le sacrifier étant donné les services qu’il rendait aux Américains. Mais il ne savait pas que l’intérêt supérieur des Américains dépassait Moubarak et son régime, et tous les clients qui se trouvaient dans la région, et c’est sans doute la raison du fait que ce qui s’est passé en janvier a été une surprise pour lui.
La carte de partition de la région était prête et le New York Times l’a publiée en décembre 2013, tout le monde pouvant s’y référer.
Les outils de la partition
Les Etats-Unis et les forces qui voulaient diviser la région devaient avoir un outil pour les aider à exécuter leur plan et qui devait comprendre divers éléments essentiels, dont :
Le premier : une présence renforcée dans la plupart des pays de la région.
Le second : la possibilité de présenter cet outil comme une alternative à ces régimes.
Le troisième : que cet outil ait une ambition illégitime qu’il soit possible d’exploiter en faisant croire à la possibilité de la réaliser.
Le choix se porta ainsi sur l’organisation internationale des Frères étant donné la profondeur des relations historiques entre les Américains et l’organisation, et les stations de contact direct depuis la guerre afghane.
Et Washington commença à intensifier les contacts avec la direction du groupe suite aux attaques du 11 septembre.
L’organisation internationale et les Américains
En 2002, l’ambassade américaine au Caire a commencé à intensifier ses contacts avec les chefs du groupe des Frères égyptiens après que leurs candidats aient obtenu 17 places aux élections de l’Assemblée du peuple de 2000 et que la situation ayant suivi le 11 septembre se soit calmée, les Etats-Unis ayant voulu améliorer leur image dans le monde arabe et islamique, et les aspects les plus importants de ces contacts étaient les suivants :
Mohammad Morsy a cherché à rencontrer l’ambassadeur américain pour l’informer du refus du groupe des opérations terroristes.
La rencontre de l’Américaine Diane Kelly, secrétaire du département politique à l’ambassade américaine, et spécialisée dans le suivi de l’activité du groupe des Frères en Egypte, avec le Frériste Salah Abdel Maqsoud, en 2002, qui lui a affirmé que le groupe avait une profonde amitié pour les Etats-Unis, et lui a demandé d’inviter les chefs du groupe pour examiner leurs orientations devant le Congrès américain.
La participation de Mohammad Morsy, président de la commission parlementaire du groupe, à la rencontre annuelle des musulmans de Suisse qui s’est tenue à Berne le 13 décembre 2002, durant laquelle il a rencontré l’ambassadeur britannique et le premier secrétaire de l’ambassade américaine, à l’occasion de la visite du secrétaire américain à l’économie et aux affaires politiques le 30 janvier 2003.
La rencontre de Mohammad Morsy lors de la célébration de la naissance de la République indienne à l’ambassade de l’Inde le 26 janvier 2003, avec l’attaché politique de l’ambassade américaine, qui lui a demandé la position du groupe sur les problèmes de la Palestine et de l’Irak.
L’Université américaine du Caire a envoyé nombre d’invitations aux chefs fréristes pour participer aux conférences organisées par des institutions américaines dans certains pays arabes de 2004 à 2006, et en particulier au Koweit, au Yémen, au Bahrein, au Qatar, en Jordanie, au Liban, en Allemagne et en Turquie, « et en particulier à Abdel Moneim AboulFoutouh et Essam al Eryan qui ont participé à ces conférences.
Les Frères ont recouru à l’aile de l’organisation internationale aux Etats-Unis, et à Hassan Hathout, président de la plus grande organisation islamique d’Amérique. C’est lui qui accueillit le premier le président Bush dans leur Centre islamique de la capitale américaine, après les attaques du 11 septembre, en tant que représentant du Conseil de coordination politique islamo-américaine, et du Conseil des affaires publiques islamiques. Le groupe transmit par le biais de Hathout un message à l’administration américaine affirmant sa capacité à fournir une aide à Washington pour absorber la colère des jeunes musulmans, et la transformer en activité positive loin de l’attitude négative des groupes extrémistes, en contrepartie du soutien américain au groupe pour affronter ces gouvernements dictatoriaux, selon leur expression.
La coopération au grand jour
Ces rencontres ont continué, mais de façon secrète jusqu’à l’occupation de l’Irak en 2003, durant laquelle le septième guide général du groupe Mahdi Akef et ex-coordinateur des relations avec l’Amérique, a demandé à l’aile de l’organisation en Irak composée du parti islamique irakien et de l’Union islamique du Kurdistan de coopérer avec le gouverneur américain d’alors Paul Bremer et de participer au gouvernement de transition formé suite à la chute du régime irakien. Cela a provoqué une crise dans l’organisation des Frères d’Irak et une intervention de Akef pour stopper la crise, et il a émis une décision où il disait que la participation des Frères au gouvernement transitoire était une affaire interne au groupe en Irak, ce qui a provoqué la démission de nombre de Frères opposés à cette participation, et à leur formation de l’Armée du salut islamique, tandis que d’autres formaient le Front des ulémasmusulmans dirigé par Harith al Dari qui rencontra Akef deux fois au Caire, en lui demandant d’intervenir pour mettre fin à la relation du Parti islamique avec le gouvernement Bremer. Mais Akef refusa estimant que c’était une affaire propre aux Irakiens.
En coordination avec la position du groupe en Irak, les plans des Frères en Egypte ont continué pour favoriser le dialogue avec les Américains, et les Frères ont commencé à contacter Dr Saadeddine Ibrahim et une délégation du groupe l’a visité suite à sa sortie de prison, car il avait établi de bonnes relations avec certains chefs des Frères, qui l’ont convaincu de jouer le médiateur pour rapprocher les points de vues des Frères et des Européens. Et cela arriva suite à sa sortie de prison, et une rencontre fut organisée en mars 2003 au club suisse.
Du côté occidental, des diplomates européens des ambassades de Grande-Bretagne, du Suisse et de Suède y ont assisté, tandis que du côté du groupe, une délégation de haut niveau était présente : Mohammad Morsy, Essam Eryan, membre du Conseil de la choura du groupe, et le journaliste Mohammad Abdel Qoddous, et le débat eut lieu sur la possibilité pour les Frères d’arriver au pouvoir, leur agenda politique et leur position sur l’Occident, la démocratie et la liberté d’expression.
Le scénario du groupe pour ouvrir des canaux avec les Américains
Les Frères considèrent ces rencontres comme partie d’un scénario général élaboré par le groupe pour ouvrir des canaux de communication avec les Etats-Unis et l’Union européenne, et les convaincre d’accepter que les courants islamistes jouent un rôle essentiel dans la région, de même que la coopération entre les Américains et les partis islamistes en Turquie et au Pakistan, outre le but essentiel d’obtenir une promesse de soutien politique américain au cas d’arrivée au pouvoir, et de faire pression sur le régime en Egypte pour qu’il accepte la présence légale des Frères.
Le même scénario s’est reproduit avec D. Saïd al Naggar visité par des Frères pour profiter de ses relations et orientations libérales, pour avoir des rencontres avec des responsables dans le département d’Etat américain, mais la discussion aborda des sujets différents loin des objectifs de la rencontre. Il resta au programme des Frères des rencontres avec l’écrivain Maamoun Fendi et Thomas Friedman.
Egalement, il est apparu à l’intérieur du groupe une autre conception de la hâte à s’entendre avec l’administration américaine, encoordination avec les Frères d’Amérique, et en particulier Hassan Hathout, étant donné ses bonnes relations avec les institutions américaines, et il a été le premier à accueillir Bush fils à son centre islamique après les attaques du 11 septembre, comme on l’a dit. Les Frères commencèrent leurs contacts et un membre du Bureau du guide allait partir en Amérique pour rencontrer des dirigeants en particulier les responsables du dossier du Moyen Orient, mais la guerre d’Irak a reporté ce projet.
Le groupe des Frères n’a participé à aucune escalade contre l’occupation américaine de l’Irak et les instructions de son guide ont contribué à confirmer son soutien, en poussant les Frères d’Irak à se joindre au gouvernement Bremer.
Les déclarations de Rice, d’Hass et d’autres ont révélé les buts de Washington derrière son dialogue avec l’organisation, car il s’agissait de contribuer au chaos dans la région, pour faciliter le redécoupage de cette région, ce qui fit l’objet du débat suivant en 2010 qui a été achevé le 22 janvier 2011 entre Morsy, le délégué des renseignements américains et le président de leur station à Istanbul. Les services de sécurité de l’Etat ont suivi ces contacts et Morsy a été arrêté le 27 janvier, mais il se produisit ce qui était planifié, et les prisons ont été envahies et Morsy a été libéré pour réaliser le scénario voulu.